L'élection récente m'a fait penser à un sujet qui me tient à coeur : la distance en gestion. Je veux parler de la distance qui existe entre une décision et les effets de son application, ou, si vous préférez, entre ceux qui décident et ceux qui vont vivre les
effets de ces décisions. Cette distance est nécessaire mais devient souvent nuisible lorsqu'elle est trop grande, et surtout quand le décideur ne connait pas la réalité des gens qui vont en vivre les
effets.
Des exemples ? Des MBA offerts à des gens qui n'ont aucune expérience de gestion (comme dénoncé par Henry Mintzberg), des gestionnaires qui ne descendent jamais sur le plancher, ou un directeur d'école critiquant une mère mono-parentale comme dans cet extrait vidéo inoubliable avec Anne Dorval très fâchée.
Or, les gens ne réagissent déjà pas très bien à subir une décision ou un changement imposés, surtout s'ils sont annoncés par écrit, et qu'ils semblent "déconnectés" de la réalité.
Pourquoi alors cette distance est-elle si présente dans les organisations ? Parce qu'elle est nécessaire pour fonctionner, pour avoir une vue d'ensemble et pouvoir des décisions efficacement. Pensez à l'armée. Qui a le temps d'aller voir tous les gens un par un dans une organisation ? En fait, la distance elle-même n'est pas le problème, mais plutôt qu'elle soit utilisée pour éviter l'affrontement ou la discussion avec les gens affectés par les décisions et actions.
Comment éviter ce piège ?
Il faut avoir ces deux mécanismes essentiels en gestion :
1- des mécanismes de communication permettant de "vendre" les décisions importantes avant leur mise en application, ou de susciter l'adhésion par la suite.
2- des mécanismes de rétro-action pour que l'information "terrain" remonte jusqu'à ceux qui prennent des décisions.
Pour les décisions importantes, on consulte un échantillon restreint mais significatif de personnes concernées. Robert Dutton, Président de Rona, expliquait qu'il allait parfois travailler avec les employés des départements vivant des défis particuliers, en faisant le même travail qu'eux. Ceci afin de revenir avec des solutions adaptées à leur réalité et probablement en ayant gagné la confiance des gens avant de leur amener un changement. Comme on ne peut le faire avant chaque décision, un mécanisme de rétro-action doit être en place et fonctionnel. Des mécanismes organisés de rétroactions sont à la base de certains systèmes de gouvernance, par exemple le double-lien en sociocratie.
En conclusion, pour pouvoir prendre de bonne
décision, la saine distance à avoir est celle qu'on prend après s'être approché du terrain pour y obtenir les informations nécessaires. On appelle ça prendre du recul... Mais pour prendre du recul, il faut d'abord s'être avancé !
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